Résumé
- Cet article explique comment récupérer la TVA sur les factures impayées de clients en faillite dans l'UE
- Conformément à la directive TVA, le fournisseur peut demander le remboursement de la TVA si la dette est définitivement perdue
- Toutefois, les formalités pour prouver l'irrécouvrabilité de la dette varient d'un pays à l'autre de l'UE.
- L'article illustre le cas d'une entreprise portugaise qui a vendu des marchandises à un client espagnol qui a fait faillite.
- Les autorités fiscales portugaises ont refusé de rembourser la TVA au motif que la procédure de faillite n'était pas régie par le droit portugais.
- La Cour de justice a jugé que cela était contraire à la directive TVA et que le fournisseur avait le droit de demander le remboursement de la TVA.
Faillite de votre client: que faut-il faire en TVA?
Lorsque votre entreprise adresse une facture incluant de la TVA à son client, elle joue le rôle de collecteur de taxes pour le compte de l’Etat : elle doit reprendre la facture dans sa déclaration TVA et payer la TVA dans les délais fixés par la réglementation TVA. A défaut, elle s’expose à des sanctions administratives et des intérêts de retard.
Le fait que le client honore ou pas le paiement de la facture n’a aucune influence en la matière.
En ces temps de grave crise économique, le risque de défaillance des entreprises est plus grand que jamais.
Alors que faire si votre client tombe en faillite ? Pouvez-vous dans cette situation réclamer le remboursement de la TVA sur votre créance ?
Que dit la Directive TVA ?
La réponse donnée par la Directive TVA est claire : lorsque le fournisseur peut démontrer que sa créance est définitivement perdue, l’Etat doit lui restituer la TVA. C’est l’expression d’un principe fondamental selon lequel la base d’imposition est constituée par la contrepartie réellement reçue et dont le corollaire consiste en ce que l’administration fiscale ne saurait percevoir au titre de la TVA un montant supérieur à celui que l’assujetti avait perçu.
Comment la règle est-elle interprétée par les administrations fiscales européennes?
Mais comment démontrer que sa créance est définitivement perdue ?
C’est ici que se trouve la source potentielle de litige avec l’administration fiscale. Afin d’éviter la fraude, de nombreux pays européens ont en effet subordonné la restitution de la TVA en cas de faillite d’un client à l’accomplissement de formalités diverses et variées.
Illustration : la mésaventure d’une entreprise portugaise
Une entreprise portugaise a vendu des marchandises à un client espagnol. Les marchandises étant restées sur le territoire lusitanien, les factures du fournisseur furent établies avec TVA portugaise. Le client espagnol n’a honoré aucune facture et est tombée en faillite.
Le fournisseur portugais présenta à l’administration fiscale le jugement du tribunal espagnol attestant de la perte définitive de sa créance et réclama le remboursement de la TVA.
Le fisc portugais pris acte de l’irrécouvrabilité de la créance mais refusa de restituer la TVA au seul motif que la procédure de faillite n’était pas régie par le droit portugais. Pour le dire autrement, le régime de régularisation de la TVA n’est applicable que lorsque le créancier et le débiteur sont des assujettis établis sur le territoire national. Aucune restitution de la TVA n’est dès lors admise lorsque le client est établi dans un autre pays européen.
Que dit la Cour de Justice ?
L’affaire fût portée devant la Cour de Justice qui prit l’ordonnance suivante : la loi TVA portugaise est contraire à la Directive TVA. Les formalités particulières exigées par la loi nationale doivent avoir pour seul objectif de s’assurer, avant la restitution de la TVA, que la créance est définitivement perdue. Et ces formalités ne doivent pas excéder ce qui est nécessaire à cette démonstration. Il n’est pas possible pour les Etats membres d’exclure purement et simplement la réduction de la base d’imposition à la TVA pour le seul motif que la faillite ait été prononcée par la juridiction d’un autre pays (Order of 29 April 2020, C-756/19).
Le cas portugais n'est malheureusement pas isolé. De très nombreuses affaires ont été déposées devant la Cour de justice ces dernières années sur le même sujet : C-588/10 (Kraft Foods Polska SA), C-589/12 (GMAC UK), C-107/13 (FIRIN), C-337/13 (Almos Agrárkülkereskedelmi), C-209/14 (NLB Leasing), C-246/16 (Di Maura), C-396/16 (T – 2), C-404/16 (Lombard Ingatlan Lízing), C-552/16 (Wind Inovation 1), C-672/17 (Tratave), C-127/18 (A-PACK CZ sro), C-242/18 (UniCredit Leasing), C-146/19 (SCT), C-292/19 (PORR Epitesi Kft.), C-335/19 (E. Spzoo), C-756/19 (Ramada Storax SA), C-844/19 (TechnoRent), C-182/20 (Administraţia Judeţeană a Finanţelor Publice Suceava and Others), C-324/20 (Finanzamt B), C-398/20 (ELVOSPOL), C-507/20 (FGSZ), etc.
L'oeil de l'expert
En cas de faillite de l’un de vos clients, vous avez le droit de demander la restitution de la TVA à la condition toutefois de bien maîtriser les formalités locales : votre demande de régularisation de la TVA doit-elle être introduite dès le jugement déclaratif du faillite du client ou uniquement lors de la clôture de la faillite (ce qui peut durer une dizaine d’années comme en Italie) ? Quels sont les documents à communiquer à l’administration fiscale? Quels sont les recours administratifs ou judiciaires possibles en cas de refus injustifié ?
Le remboursement de la TVA est un droit fondamental pour chaque entreprise. Mais l’exercice de ce droit est parfois difficile à exercer.
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