La facturation de travaux de rénovation: avec ou sans TVA?
Lorsqu'un entrepreneur réalise des travaux de rénovation d'un bâtiment pour un client assujetti tenu au dépôt de déclarations périodiques, il doit en principe appliquer le régime dit du "cocontractant" et lui délivrer une facture sans TVA, à charge pour le client d'autoliquider lui-même la taxe dans sa déclaration TVA.
Cette règle locale d'autoliquidation de la TVA a été instaurée dans les années '80 dans le but de stopper la fraude fiscale endémique constatée à l'époque dans le secteur de la construction. Depuis lors, cette règle est devenue un réflexe pavlovien pour tout entrepreneur : il sais qu'il doit facturer sans TVA lorsque son client est une entreprise.
Il faut cependant toujours se méfier des règles TVA qui paraissent simples. Le régime dit du "cocontractant" doit être manié avec une extrême prudence car le retour de bâton n'est jamais très loin comme le démontrent les quelques exemples ci-après.
Preuve de la qualité du client
C'est à l'entrepreneur (celui qui réalise les travaux) d'apporter la preuve qu'il a appliqué à juste titre le report de paiement de la TVA à son client par un ensemble de documents. Une simple vérification sur le site « VIES » du numéro de TVA dudit client n'est pas suffisante en soi. Les éléments de preuve utiles sont par exemple une déclaration du client certifiant qu'il est tenu au dépôt de déclarations périodiques et qu'il remplit toutes les conditions du régime de report de paiement et, le cas échéant, par une attestation émanant de l'administration fiscale certifiant que le client a la qualité d'assujetti déposant (Q.P. n° 199 dd 15.02.2012 - Brotcorne)
Régime du cocontractant applicable même lorsque le client est un assujetti partiel
L'entrepreneur doit facturer les travaux immobiliers avec autoliquidation de la TVA (régime dit du "cocontractant") lorsque son client est un assujetti total, un assujetti mixte ou un assujetti partiel, déposant des déclarations périodiques à la TVA (à l'exception de l'assujetti étranger qui n'a pas fait agréé de représentant responsable) et ce, peu importe la destination donnée à ce travail par le cocontractant. Le report de paiement est, par conséquent, également d'application lorsque les travaux sont exclusivement destinés aux activités du client qui tombent en dehors du champ d'application de la TVA. (Décision TVA n° E.T. 122.360 du 20.03.2012)
Sanctions financières si l'autoliquidation de la TVA a été appliquée à tort...
Un entrepreneur de construction doit facturer ses travaux immobiliers avec application du régime dit du « cocontractant » (art. 20 de l'A.R. n° 1) notamment lorsque son client est un assujetti établi en Belgique tenu au dépôt de déclarations périodiques à la TVA (mensuelles ou trimestrielles). Ce régime ne s'applique pas lorsque le client est un assujetti soumis au dépôt de déclarations TVA spéciales. Dans le cas soumis au tribunal, un entrepreneur de construction avait fait application du régime dit du « cocontractant » pour des travaux immobiliers effectués pour le compte d'un organisme public (SPF Économie). Il avait donc facturé ce dernier sans application de la TVA en prenant soin de renseigner le numéro de TVA du SPF Économie sur sa facture. L'administration de la TVA contesta l'application de ce régime d'autoliquidation de la TVA en arguant du fait que l'organisme public en question n'était pas un assujetti tenu de déposer des déclarations périodiques à la TVA. Le tribunal donne raison à l'administration. Pour l'application du régime dit du « cocontractant », un entrepreneur ne doit pas seulement vérifier si son client est enregistré en tant qu'assujetti à la TVA, mais également si celui-ci est tenu de déposer des déclarations périodiques à la TVA.
C'est donc à tort que ce régime a été appliqué par l'entrepreneur de construction (Appel - Anvers - 6/11/2011).
... ou perte du droit à déduction si la TVA facturée au lieu du régime du cocontractant
Les autorités fiscales peuvent refuser à une entreprise le droit de déduire la TVA qui aurait été erronément facturée par un fournisseur lorsque l'opération était soumise au régime de l'autoliquidation (TVA due dans le chef du client), y compris lorsque la correction de cette erreur est impossible en raison de la faillite dudit fournisseur (C.J.U.E., 424/12 du 06/02/2014 - Fatorie).
Simplification de la facture en cas de multiples prestations
La décision portant le n°84.160 du 12/06/1995 admet à titre de simplification que lorsqu’une partie des opérations tombe sous l’application de l’article 20 de l’arrêté royal n° 1 précité et l’autre pas, le régime du report de la perception soit appliqué pour le tout, de telle sorte que la facture ne doit pas être ventilée. Cette tolérance ne trouve toutefois à s’appliquer que pour autant que l’objet principal du contrat soit une opération visée par le régime du report de la perception et que, par conséquent, les éléments dudit contrat ne tombant pas dans le champ d’application de ce régime n’en constitue que l’accessoire».
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